TM 30-20
Introduction
Sommaire
Pourquoi un nouvel indice ?
Depuis l’arrivée de la LED, les limitations de l’IRC ont été de plus en plus évidentes, comme par exemple l’indice moyen Ra – valeur caractéristique repère – qui prend la moyenne des 8 premiers échantillons de couleurs sans prendre en compte le rouge intense R9 régulièrement mal rendu par les LED. Cela introduit de plus en plus une différence entre le ressenti des observateurs et cette valeur calculée prise comme référence.
De manière plus générale, la non continuité des sources des références (passage abrupt à 5000 K de la lumière naturelle au corps noir) et surtout le panel peu qualitatif d’échantillons de couleurs de l’IRC sont régulièrement décriés, ce qui a conduit depuis quelques années la communauté de l’éclairage à réfléchir à la mise en place d’une nouvelle méthode pour pallier les inconvénients de l’IRC : la IES TM 30-15 (TM 30-20 depuis septembre 2019) développée par l’Illuminating Engineering Society (IES) of North America en 2015 semble être prête à relever le défi.
Sur ces deux aspects, la CIE a suggéré de développer, de meilleures méthodes de caractérisation de la qualité des couleurs pour mesurer et spécifier les sources de lumière blanche. Pour ce faire, le travail a été divisé en deux tâches : (1) développer un indice de fidélité des couleurs scientifiquement précis (attribué au comité technique TC 1-90), et (2) développer une ou plusieurs mesures de la perception de la qualité des couleurs au-delà de la fidélité (attribué au comité technique TC 1-91).
Ce Rapport Technique, développé par le comité technique TC 1-90, est un rapport de recherche décrivant un indice général de fidélité des couleurs (Rf) par rapport à un illuminant de référence. Bien que certains problèmes techniques requièrent encore de plus amples recherches, cette mesure de la fidélité des couleurs est scientifiquement précise. Cet indice, basé sur l’indice de fidélité TM-30-15 développé par Illuminating Engineering Society of North America, répond à la première partie des limites de l’IRC (il ne couvre pas le besoin de mesure de la qualité des couleurs autre que la fidélité) et corrige plusieurs imprécisions de l’IRC (Ra) en tant que mesure de la fidélité des couleurs. Les améliorations les plus importantes par rapport à l’IRC sont la mise à jour de la méthode de calcul des différences de couleur, en utilisant en particulier un espace de couleur uniforme, et l’introduction de 99 échantillons colorés ayant une répartition plus uniforme des pentes et des courbures en fonction de la longueur d’onde et étant plus largement et uniformément répartis dans les trois dimensions de cet espace de couleur uniforme.
L’indice général (Rf) représente à quel point les apparences des couleurs de l’ensemble de la collection sont en moyenne reproduites (rendues) sous une source test par rapport à leurs apparences sous un illuminant de référence. Ainsi Rf, comme Ra, combine les différences de couleurs calculées pour chaque échantillon de couleur en une valeur moyenne unique. Il traite seulement d’un aspect de la qualité des couleurs et ne prend pas en compte les effets liés à la perception/préférence. Par conséquent, des utilisations fortuites de l’IRC comme une mesure globale de la qualité des couleurs ne seront pas mieux remplies par l’indice de fidélité des couleurs scientifiquement précis, Rf. En effet, l’évaluation des utilisateurs est influencée par des facteurs plus vaste que la fidélité des couleurs tels que les effets de saturation des couleurs ou l’influence de la nature des tâches à effectuer. L’indice général de fidélité des couleurs Rf ne se substitue pas à l’IRC pour classer ou spécifier les produits ni pour répondre aux exigences minimales de performances réglementaires. Le remplacement de l’IRC sera matière à des études et des discussions futures qui devront évaluer Rf ainsi que l’ensemble de nouvelles mesures de la qualité des couleurs et proposer des recommandations pratiques pour les produits manufacturés et les utilisateurs finaux. »
Comparaison entre IRC et TM 30-20
Les principales différences et améliorations de la TM 30-20 par rapport à l’IRC sont :
– Choix méticuleux de 99 échantillons de couleurs – choisis dans une base plus de 105 000 références – au lieu des 8 (plus 7 additionnelles) de l’IRC en utilisant le modèle le plus récent d’apparence des couleurs (passage du CIE 1964 U*V*W* au CIECAM02-UCS datant de 2002). Ces échantillons sont plus uniformément répartis et sont plus représentatifs
– Suppression des valeurs négatives des Ri de l’IRC qui perturbent les moyennes dans les cas de valeurs extrêmement basses
– Continuité des sources de références, avec un changement introduit entre 4 500 K et 5 500 K en mixant le référent lumière du jour et le référent corps noir pour éviter la rupture à 5 000 K
Du coup, l’indice de référence Rf, calculé selon la même méthode que l’indice Ra avec sources de références et échantillons de couleurs, est donc plus précis et pertinent que l’indice Ra.
Enfin, pour compléter cet indice unique qui ne permet pas de rentrer dans les détails, la TM 30-20 propose :
– L’indice de saturation Rg (Gamut index)
– Une représentation graphique vectorielle de distorsion teinte/saturation
– Quatre valeurs détaillées (Rf,skin : fidélité de la peau, Rf# : fidélité par teinte, Rc# : variation chromatique par teinte et Rf,CES# : fidélité par échantillon)
La méthode d’évaluation de rendu des couleurs TM 30-20 se veut donc à la fois plus précise et plus complète que l’IRC.
Tableau récapitulatif IRC versus TM 30-20
CIE 13.3-1995 (IRC) | IES TM 30-20 | |
Année | 1965, 1974 (révision), 1995 | 2015 |
Espace de couleur | CIE 1964 U*V*W | CAM02-UCS (CIECAM02) |
Nombre d’échantillons de couleur | 8 généraux (pour Ra) plus 7 spécifiques | 99 |
Couverture de l’espace des couleurs | Limitée | Pleine et équitable |
Échantillons saturés | Non | Oui |
Types d’échantillons | Échantillons de Munsell | Divers objets réels (naturels et artificiels) |
Uniformité spectral des échantillons | Non | Oui |
Sources de références | Lumière naturelle et corps noir | Lumière naturelle et corps noir |
Transition des sources de référence | Abrupte à 5000 K | Atténuée entre 4000 K et 5000 K |
Mesures | Indice général moyen : Ra (8 premières valeurs) 7 indices spécifiques (fidélité) : Ri |
Indice de fidélité : Rf Indice de saturation : Rg Représentation graphique vectorielle de saturation Indices de fidélité de 16 teintes : Rf# Indices de variation chromatique pour les 16 teintes : Rc# Indice de fidélité de la peau (échantillons 15 et 18) : Rf,skin 99 indices de fidélité individuels : Rf,CES# |
Échelle | Maximum 100 sans limite basse, échelle variable | De 0 à 100, échelle cohérente |
Lien entre Ra et Rf
L’indice de référence Rf de la TM 30-20 est compris entre 0 et 100 (comme l’indice Ra de l’IRC) mais sa valeur est bien évidemment différente de celle du Ra car si la méthode de calcul est similaire, les sources de références (éventuellement), les échantillons de couleurs et la formule de calcul sont différents.
Un coefficient a d’ailleurs été inséré dans les formules de Rf pour que la valeur de Rf corresponde en moyenne à celle de Ra (pour ne pas perturber les habitudes du marché).
Il n’y a évidemment pas de relation évidente entre les deux (il est nécessaire d’effectuer les deux calculs séparément) et les différences dépendent du spectre des sources étudiées. Toutefois, dans les valeurs hautes (Ra>85 environ) et notamment pour les sources fluorescentes à spectres étroits (qui ont des pics importants dans leurs spectres qui peuvent correspondre aux besoins de l’IRC), Rf est généralement inférieur à Ra.
TM 30-20
Détails de la méthode de calcul
La TM 30-20 propose 99 échantillons de couleurs répartis de manière homogène en teinte et saturation. Ils ont été choisis méticuleusement pour que les indices en ressortant soient les plus pertinents possible pour les différentes applications de la vie courante : d’une première base de plus de 105 000 couleurs, plus de 60 000 couleurs ont été sélectionnées dans un premier temps pour en retenir ensuite environ 5 000 et aboutir finalement aux 99 échantillons ci-dessous (ce qui permet d’avoir un panel relativement petit mais très efficace). Les critères de sélection ont été les suivants :
– Une même distribution dans l’espace CAM02-UCS de 2002 (qui permet de prendre en compte la perception des couleurs parmi une grande variété de conditions d’observation)
– Une excellente uniformité spectrale (voir dessin ci-dessous)
– Des échantillons choisis parmi une variété d’objets artificiels et naturels (divisés en 7 types : nature, peau, textile, peinture, plastique, imprimé et système de couleurs).
– Type A : nature
– Type B : peau
– Type C : textile
– Type D : peinture
– Type E : plastique
– Type F : matière imprimée
– Type G : système de couleurs
Le principe de la méthode de calcul est similaire à celui de l’IRC (comparaison de rendus entre une source référente et la source étudiée sur des échantillons de couleurs) mais avec des fonctions additionnelles :
L’indice de fidélité de chaque échantillon Rf,i est calculé ainsi que la moyenne Rf des 99 échantillons.
Puis, un indice Rf,skin a été créé en ne prenant en compte que les échantillons numéro 15 et 18 pour les situations où le rendu de la couleur de la peau est important (cinéma, télévision, mode, studio photo…).
Teintes, Saturation et représentation vectorielle
Ensuite,16 secteurs angulaires réguliers sont dessinés dans l’espace colorimétrique CAM02-UCS pour déterminer 16 teintes représentatives.
Ensuite, des moyennes sont calculées dans chaque secteur pour avoir les valeurs par teinte, ce qui donne – une fois les points reliés entre eux -, les polygones bruts ci-dessous :
Une fois ces 16 teintes définies, il est possible d’établir :
– l’indice de fidélité Rf# par teinte
– l’indice de variation chromatique Rc# par teinte
– une représentation graphique vectorielle de distorsion teinte/saturation puis le calcul de l’indice de saturation Rg
La saturation est un élément du rendu colorimétrique important comme le montre l’importance de l’utilisation de l’espace TSL, notamment pour le grand public dans les logiciels courants.
Vert peu saturé :
En l’occurrence et afin de comparer la source test à la source de référence, Rg = 100 x (Aire testée / Aire de référence), ce qui signifie que si l’aire comprise à l’intérieur du polygone blanc (hachuré au centre) est supérieure à l’aire de référence comprise à l’intérieur du polygone noir (non hachuré), l’indice de saturation Rg sera supérieur à 100.
Globalement, Rg est compris entre environ 60 et 140 pour un Rf>50, voir schéma ci-dessous où le cône d’ailleurs montre bien la cohérence des indices Rf et Rg (c’est à dire que plus Rf est grand, plus Rg est proche de 100) :
Exemples de représentations graphiques
Les représentations graphiques couramment utilisées dans la TM 30-20 reprennent les schémas ci-dessus (utilisés pour calculer Rg par exemple) mais la représentation de la source de référence est transformée en cercle pour une meilleure lecture. Cela permet de voir plus précisément comment varient les rendus de couleurs suivant les teintes angulaires :
– si le point de la source test est à l’intérieur du cercle correspondant à la source de référence, il y a diminution de la saturation
– si le point de la source test est à l’extérieur du cercle correspondant à la source de référence, il y a augmentation de la saturation
– si le point de la source test est sur le cercle mais en « décalé », il y a changement de teinte.
Conclusion
La TM 30-20 est donc très complète et a beaucoup d’atouts pour prendre la place de l’IRC mais comme le précise la CIE 224 en conclusion (voir ci-dessous), il est encore nécessaire d’avoir des retours d’expérience pour imposer cette méthode.
L’inertie globale du marché peut être également un frein même si certains organismes officiels conseillent maintenant d’indiquer, à côté de l’indice Ra de l’IRC, des valeurs de la TM 30-20 comme l’indice Rf voire l’indice Rg.
La TM 30-20 : au-delà de la mesure, un outil
La TM 30-20 permet de mesurer en toute objectivité le rendu des couleurs sous un éclairage donné mais les effets recherchés ou les préférences des utilisateurs dans bien des cas ne correspondent pas à Rf=100 et Rg=100, c’est à dire à un rendu des couleurs identique à celui de la lumière référente.
En effet, suivant les situations, il peut être intéressant de saturer telle ou telle couleur (pour des besoins esthétiques ou marketing par exemple) et de nombreuses études montrent que, de manière générale, les utilisateurs ont tendance à préférer un Rf au plus près de 100 mais des couleurs plutôt saturées, donc un Rg supérieur à 100 (les sources de lumière ayant un Rg inférieur à 80 voire 90 sont d’ailleurs rapidement mises de côté lors de tests).
Cette possibilité de plus ou moins saturer les couleurs correspond d’ailleurs à l’une des valeurs ajoutées que peut apporter la lumière artificielle (ce qui peut même aller jusqu’à proscrire l’apport de lumière naturelle pour mieux maîtriser les couleurs, comme cela peut être le cas dans l’aménagement de magasins).
The general colour fidelity index value, Rf, however, does not address the need for perception-related colour quality measure(s) beyond fidelity, which is addressed in TC 1-91 and future work. Although the CIE general colour rendering index, Ra, was not intended for such use by the CIE, it has been expected, by many users, to provide overall colour quality information for lamp selection. Clearly, the general colour fidelity index, Rf, described in this report is not designed for such a purpose and is not recommended to replace, for the purpose of rating and specification of products in general lighting nor for regulatory or other minimum performance requirements, the CIE general colour rendering index, Ra (CIE 1995). Colour fidelity is only one of the important aspects of colour quality for the evaluation and specification of white-light sources, and the method described in this Technical Report is provided for consideration in the development of a future harmonized set of colour quality characterization methods that together can be used for users’ lamp selection and rating of lighting products.
The CRI was designed as a colour fidelity measure but contained unintentional inaccuracies in its formulae and used a limited number of test-colour samples. As a result, the CIE general colour rendering index, Ra, deviated from a scientifically accurate colour fidelity measure. However, for many years lighting manufacturers have been using the CRI as a measure for designing and developing light sources, to help achieve the critical balance between colour quality and energy efficiency for different applications.
Thus the general colour fidelity index, Rf, and the general colour rendering index, Ra, have different characteristics. Similar to the general colour rendering index, Ra, the general colour fidelity index, Rf, combines the computed colour differences for all test-colour samples in one single average index value, and is only one aspect of colour quality not considering perception/preference effects. Therefore, it is considered that such unintended uses of CRI as an overall colour quality measure for end users may not be better fulfilled by a more accurate general colour fidelity index, Rf. This is because the users’ evaluation is influenced by factors beyond colour fidelity such as chroma effects, and the detailed nature of specific illumination tasks. Thus a possible extension or replacement of the CRI will be a matter of future study and discussion that will include the evaluation of Rf along with development of a harmonized set of new colour quality measures for assessing perception-related effects beyond colour fidelity and practical aspects for manufactures and end-users. This Technical Report with the description of the general colour fidelity index, Rf, is one contribution toward that greater effort.
It should also be understood that the scientifically accurate colour fidelity index proposed in this report is being presented for assessment by the worldwide lighting community, which may lead to further improvements. For example, it will be important to check whether the sensitivity of CAM02-UCS in the blue region appropriately assesses the impact of shifts of peak wavelength in white phosphor LEDs. Users may also evaluate the accuracy benefits of using 99 test-colour samples against the practical advantages of using a smaller number. »
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