Thermique du luminaire
Introduction
Dans l’éclairage actuel donnant une part importante à l’électronique, les aspects thermiques sont des éléments essentiels à bien maîtriser pour garantir le bon fonctionnement et de bonnes performances des sources et des luminaires. En effet, en plus des enjeux de dilation ou rétraction mécaniques, les composants électroniques sont détériorés dès que les températures avoisinent 70°C ou 100°C (suivant leur qualité).
Les températures dans l’éclairage
De nombreuses températures entrent en compte dans l’éclairage d’une manière générale, de la température donnée par le fournisseur de composants électroniques (barrette ou driver LED par exemple) à la température de la pièce, la seule accessible et maîtrisée par l’utilisateur.
Sommaire
Les composants du luminaire
Pour les fabricants de luminaires, tout composant utilisé doit être examiné sous un aspect thermique :
– les températures atteintes sont très loin des points de fusion des métaux utilisés qui ne sont donc pas impactés sauf pour des effets de dilation/rétraction ou plus exactement de différence de dilation/rétraction entre des matériaux différents.
– les plastiques avec des températures de fusion comprises entre 100°C et 250°C sont plus fragiles avec des températures d’utilisation conseillées bien inférieures (80°C pour le PMMA par exemple et 120°C pour le polycarbonate).
– les composants électroniques sont les éléments les plus sensibles et les fournisseurs indiquent des températures à ne pas dépasser (Tc : Température critique) à un endroit bien précis de l’élément. Le fabricant de luminaires doit vérifier et être garant que l’architecture de son luminaire – dans des conditions d’utilisation précises – ne conduise pas à des températures supérieures à celles indiquées par le fournisseur sous peine de détériorer ces composants (et de perdre la garantie annoncée).
Définitions
Tc (température critique) est la température critique à ne pas dépasser sous peine de dégrader un composant électronique (ballast, driver ou module LED). Le Tc correspond également à un point physique dessiné sur le composant et indique l’emplacement où les sondes doivent être placées pour effectuer les mesures.
Tp (Température de performance) est la température conseillée par les fabricants de composants électroniques pour avoir des performances optimales. Suivant les cas, il peut s’agir également de la température réelle de fonctionnement sur le point physique Tc du composant.
Ces indications (point de mesure et températures à ne pas dépasser) sont bien visibles sur les barrettes ou driver LED, voir ci-dessous :
– Barrette LED
– Driver LED
La norme NF EN 60598-1 Avril 2015 : Luminaires – Partie 1 : exigences générales et essais (partie générale commune à tous les luminaires) précise de manière exhaustive toutes les températures à ne pas dépasser suivant les matériaux et composants utilisés dans la fabrication du luminaire.
La température de la pièce
Les températures évoquées ci-dessus ne concernent que le luminaire et sont généralement éloignées de ce à quoi peut accéder l’utilisateur : le seul point commun est la température de surface du luminaire qui peut être potentiellement dangereuse et qui est limitée à 60°C pour les parties métalliques par la norme. Cette température de surface doit être mesurée avec un appareil spécifique (avec des sondes par exemple) et généralement ressentie par l’utilisateur.
Par contre, l’utilisateur ne peut mesurer et éventuellement influencer que la température de la pièce dans laquelle il est – température ambiante appelée Ta ou Tq – et se doit de vérifier que cette température est compatible avec les données du fabricant. En pratique, il n’est nécessaire de vérifier que si les températures ambiantes sont « exceptionnelles », c’est à dire dans des régions tempérées en dehors de la plage 5°/35°C environ (et attention aux efficacités qui peuvent diminuer sensiblement avec les écarts de températures, notamment pour les sources fluorescentes).
Lien entre les températures
Le fabricant de luminaires se doit de faire le lien entre les températures internes au luminaire et la température ambiante : à partir des consignes des fournisseurs de composants électroniques et il doit mesurer et fournir – par l’intermédiaire d’une fiche technique par exemple – la plage de températures ambiantes dans laquelle peut être installé le luminaire.
L’équipement adéquat est une enceinte thermique où il est possible de maîtriser la température intérieure – qui correspond à la température ambiante dans laquelle sera installé le luminaire – et de mesurer en conséquence en différents point stratégiques avec des sondes les températures à l’intérieur du luminaire, notamment sur tous les points Tc.
Important
Ce test thermique permet au fabricant de garantir un bon fonctionnement et une bonne efficacité du luminaire ainsi construit et de reprendre à son compte la garantie du fournisseur.
Thermique dans le luminaire
Bilan énergétique des sources
Comme il a été étudié dans la partie théorique, toute la puissance électrique consommée par les sources d’éclairage est en très bonne approximation transformée en chaleur. Pourtant, cette chaleur n’est pas de même nature suivant les sources et voici un bilan énergétique synthétique (en partie d’après C.Meyer et H. Nienhuis) :
Conduction convection (%) |
UV (%) |
Visible (%) |
Infrarouge (%) |
Commentaires | |
Incandescence 100W | 15 | – | 10 | 75 | Principe du corps noir donc les infrarouges sont très présents |
Fluorescent rectiligne | 71,5 | 0,5 | 28 | – | Les lampes fluorescentes – grâce à leurs poudres spécifiques – n’émettent pratiquement que dans le visible |
Fluorescent compacte | 80 | 0,5 | 19,5 | – | |
Iodures métalliques | 50 | 1,5 | 24 | 24,5 | Ces familles de lampes à décharge – qui ne sont opalisées que pour des raisons de confort d’éclairement et non par nécessité comme les sources fluorescentes – émettent des ondes qui ne sont pas transformées, sont donc moins précises et « débordent » sur les UV et infrarouges. |
Sodium Haute pression | 44 | – | 31 | 25 | |
Sodium basse pression | 31 | – | 35 | 34 | |
LED | 65 | – | 35 | – | Les LED – n’émettent pratiquement pas dans l’infrarouge et les UV |
Lampe dichroïque » ou « cool beam lamp
Afin de ne pas chauffer et donc éventuellement endommager les objets éclairés, des lampes halogènes dichroïques ont été développées : contrairement à leur nom qui pourrait laisser penser qu’il s’agit de séparer deux couleurs, le principe est de séparer le rayonnement visible du rayonnement infrarouge. Un réflecteur spécifique a donc été développé pour réfléchir et diriger la lumière visible mais il est transparent aux ondes infrarouges qui peuvent se propager vers l’arrière. Le terme anglais « cool beam lamp » traduit bien ce phénomène, même si une partie non négligeable de la chaleur est quand même dirigée vers le sujet éclairé : toute l’énergie des ondes visibles (environ 15% pour l’halogène) ainsi que tous les rayons infrarouges directs (qui dépendent de la forme du réflecteur).
Températures des composants
Voici quelques valeurs de températures minimales et surtout maximales à respecter pour le bon fonctionnement des différents matériaux et composants. Ces valeurs ne sont qu’approximatives et dépendent des fabricants.
Température minimale (°C) | Température maximale (°C) | ||
Matériaux | Métaux | Pas de limite car les autres composants et/ou matériaux sont plus sensibles | |
Polycarbonate | -40°C | 120°C | |
PMMA | -20°C | 80°C | |
Composants | Interrupteur | Marquage T ou 55°C | |
Ballast magnétique | -20°C (température ambiante) | Tw ou +80°C (température ambiante) | |
Ballast électronique | -25°C (température ambiante) | Tc ou +60/80°C (température ambiante) | |
Driver LED | -25°C (température ambiante) | Tc ou +60/80°C (température ambiante) | |
Sources | Lampe incandescente et halogène | Pas de valeurs spécifiques chez les fabricants, ce qui est cohérent avec le principe de fonctionnement robuste de l’incandescence, notamment les très fortes températures en jeu à l’intérieur de ces sources. | |
Sources fluorescentes | Pas de valeurs spécifiques chez les fabricants mais ne pas oublier que l’élément le plus sensible est le ballast électronique et que les efficacités baissent très sensiblement avec la température. A titre d’exemple, un tube T5 ne produit que la moitié de son flux maximum à 5°C (-5°C pour les T8). | ||
Iodures métalliques, sodium haute et basse pression | Pas de valeurs spécifiques chez les fabricants mais les températures en jeu – notamment au niveau des douilles – sont très importantes pour les fortes puissances. Les lampes ne sont pas les plus fragiles et ce sont les autres composants qui cèdent en premier. | ||
LED | -25°C (température ambiante) | Tc ou +60/80°C (température ambiante) |
Les luminaires
Les luminaires sont les contenants des sources et sont donc soumis à la chaleur dégagée par celles-ci. Les conséquences peuvent être multiples et le fabricant, en plus des températures à respecter à l’intérieur du luminaire (voir ci-dessus) doit se prévenir des éventuels problèmes suivants en cas de fortes températures :
– Chaleur de surface extérieure excessive
– Dilatation ou différence importante de dilatation entre deux matériaux ce qui peut entraîner des problèmes mécaniques
– Augmentation de la pression pour les luminaires étanches qui peuvent provoquer l’expulsion d’embouts ou de bouchons par exemple.
Les températures froides – outre leurs conséquences sur les composants et notamment l’allumage des lampes à décharge – peuvent engendrer également des problèmes mécaniques par rétraction de la matière suivant l’architecture du luminaire et les conditions d’utilisation.
Solutions et dispositifs spécifiques
Les solutions pour les fabricants de luminaires pour respecter les températures sont :
– Choisir des matériaux avec une bonne conductivité thermique pour pouvoir évacuer la chaleur par conduction/convection (aluminium par exemple)
– Adapter la puissance du luminaire aux matériaux, aux dimensions et à l’architecture du luminaire
– Ajouter des dispositifs spécifiques (radiateurs, ailettes…)
La récupération de la chaleur parait séduisante mais n’a concrètement pas d’application pratique : la chaleur étant l’énergie la plus dégradée, le rendement de cette opération (par effet Seebeck par exemple) est tellement mauvais que ce procédé n’est pas sorti des laboratoires.
Applications spécifiques
Comme étudié ci-dessus, les sources actuelles sont – pour des petites ou moyennes puissance – électroniques donc sensibles à la température. Les cas spécifiques de basses et surtout de hautes températures sont donc à examiner plus spécifiquement :
– Pour les basses températures, l’arrivée de la LED a été une aubaine puisque la LED et les drivers sont annoncés pour un fonctionnement jusqu’à -25°C environ. De plus, l’efficacité des LED augmente avec la baisse de température, ce qui rend cette source particulièrement intéressante pour ce type d’application.
– Pour les hautes températures, la LED peut également être utilisée car elle supporte des températures ambiantes jusqu’à 80°C (voire 95°C) à condition d’avoir une très bonne maîtrise de la température (grande surface d’échange thermique en aluminium, faible puissance, convection forcée…). Les lampes à décharge comme la fluorescence sont également performantes sous réserve d’une architecture spécifique et de composants de qualité (jusqu’à 100°C environ). Par contre, pour les très hautes températures (comme dans des fours par exemples), seules des sources incandescences pourront être utilisées sans risques.
Dans tous les cas, le fabricant de luminaires doit être vigilant aux dilatations/rétractions mécaniques dues aux basses ou hautes températures.
mise à jour :